Comme je rate mon mashrutka, c’est en taxi que je rejoins Stepanakert à une centaine de kilomètres de Goris. Nous traversons des collines verdoyantes creusées par endroit par de profonds canyons et arrivons à la frontière avec la république du Nagorno-Karabakh. Les douaniers sont sympathiques et parlent même l’anglais. Ils me rendent mon passeport et me donne une adresse à la capitale, Stepanakert, où je dois me rendre dans les 24h pour faire mon visa. Je remonte dans le taxi où nous roulons une bonne heure sur des routes sinueuses à travers les montagnes de ce petit état non reconnu au niveau international. Arrivé sur place, je tombe enfin sur un salon de coiffure. Après quelques gesticulations appuyées par des mots de russe, la coiffeuse m’attaque au rasoir. Un peu inquiet au début, ma coupe est finalement pas trop mal réussie. Je me rend ensuite dans un point de vente de Karabakh Telecom pour acheter une carte SIM. En raison de leur monopole, il faut faire la queue et leur tarifs sont proches de ceux pratiqués en Suisse. Je me rend ensuite au ministère des affaires étrangères pour obtenir mon visa. Je rempli un formulaire et un officiel m’invite à prendre place. Très arrangeant, il me donne un accès à l’ensemble du terrritoire à l’exception de la zone de front.
Il pleut des cordes et une brume épaisse recouvre la ville qui n’a pas l’air très animée malgré la présence d’une université. Après 1km de marche, je trouve enfin un café pour boire une bière et songer à un endroit où dormir ce soir. Un jeune arménien, Tigran, me demande alors si il peut s’assoir à ma table. Il m’explique accompagner un norvégien en chaise roulante et son assistant venu faire un reportage sur la ligne de front. Nous discutons longuement avant d’aller faire un tour au marché une fois le soleil revenu. Il me dit loger dans un B&B bon marché et me propose de le rejoindre. ce que j’accepte. En voyant le grill dans le jardin et le soleil enfin de retour, nous souhaitons acheter du bois, de la vodka artisanale, des viandes et de la marijuana pour un barbecue mais presque tout est épuisé en raison de la guerre. Nous achèterons alors notre viande grillée auprès d’un boucher disposant d’un four à bois et quelques bouteilles de vodkas russes que nous rapportons dans notre famille d’accueil. Le repas est succulent et après quelques vodkas, nous nous emballons dans des discussions sur la guerre et la géopolitique avec Tigran et la famille d’accueil. Nous trinquons à la paix et aux soldats au front (il y a des morts chaque jour, des jeunes d’à peine 20 ans dans les deux camps et la situation a nettement empirée depuis l’attaque de l’Azerbaijan quelques semaines auparavant). La famille d’accueil suit l’actualité en permanence car des attaques plus sévères peuvent survenir à tout moment. La nuit nous entendons les bombes au loin.